dimanche 9 mars 2014

Cosplay de Laurent Ladouari

Année d'édition : 2014
Edition : Editions HC
Nombre de pages : 474
Public visé : Adulte
Quatrième de couverture :
ADAMAS, milliardaire cynique et haï de tous, rachète une ancienne gloire de l’industrie au bord de la faillite : 1T.
Le redoutable prédateur déclare vouloir la détruire.
Cela n’a aucun sens.
Le même jour, par un invraisemblable concours de circonstances, KATIE DÛMA parvient à se faire recruter par 1T.
Comme les trois mille autres employés, KATIE est invitée à plonger dans l’univers virtuel du COSPLAY : un jeu de masques où chacun agit et communique sous le couvert de l’anonymat.
Le COSPLAY n’a pas de règles : ce jeu de simulation prône une liberté totale. Protégé par son masque, chacun révèle sa véritable humanité : calomnies, délations et règlements de compte se déchaînent dans une explosion de violence sans précédent.
Le COSPLAY est la bombe envoyée par ADAMAS pour anéantir 1T.
Mais depuis l’intérieur du jeu, KATIE organise la résistance.




Cosplay est à la fois un roman d’anticipation quasi post-apo et une contre-dystopie. Il va laisser perplexes pas mal de lecteurs parmi ceux qui ne sont pas habitués à ces types de littératures… Pour les autres lecteurs, cela ne posera au contraire aucun souci d’immersion, par contre la magie va opérer ou non. Car, sans qu’on puisse le réduire à un roman bisounours, Cosplay se veut humain, positif, et prend joyeusement à contre-pied la mode actuelle qui veut que tout soit sombre et sans espoir (ou si peu), surtout dans ces genres-là. Du coup, je ne serais pas étonnée d’apprendre que des lecteurs l’ont jugé naïf par certains aspects et n’ont pas accroché.
Ce n’est pas mon cas, car c’est au contraire le genre de roman que j’aimerais lire plus souvent, le genre de lecture qui agit comme un bouclier (ou une tablette de bon chocolat). Il fait du bien au moral, ce roman. Je remercie Louve de m’en avoir offert la lecture dans le cadre d’un partenariat entre le forum Mort-Sûre et l’éditeur.

Je me suis régalée à lire Cosplay, du début à la fin, d’autant plus je me suis beaucoup amusée tout au long de cette lecture. Si j’ai mis du temps pour rédiger mon retour, c’est que le roman n’est pas exempt de défauts, pourtant je ne savais pas comment en parler sans pécher par excès d’enthousiasme.

Je commencerai par un point qui me paraît important : la quatrième de couverture est terriblement trompeuse, cependant on le comprend dès le début de la lecture.
D’une part, Adamas n’est pas le « Grand Méchant » de l’histoire, au contraire : vu ce qu’en pensent de nombreux personnages, on s’attend vite à ce qu’il soit à contre-courant. De plus, même s’il tire les ficelles, c’est un personnage qui reste en retrait.
D’autre part, Katie n’est pas la fraîche « héroïne » qui fait tout basculer. Cela pour une bonne raison : Cosplay tient plutôt du roman choral, où chaque personnage peut bénéficier de son moment à lui, être mis en valeur ou au contraire chuter… et c’est ce qui fait sa force, à mes yeux. La galerie de personnages est savoureuse, parfois un peu trop typée, certes, cependant cela ne m’a pas dérangée. Beaucoup sont très attachants, touchants, et cela a contribué à me faire apprécier ce roman.

À ce stade, il serait temps que j’aborde le sujet de celui-ci : il parle avant tout du milieu de l’entreprise, plus précisément des entreprises dédiées à la recherche, en les imbriquant dans un contexte économique proche du nôtre… et c’est à ce niveau qu’opère la dystopie. Dans Cosplay, une crise a dégénéré en guerre civile et fractionné plus que jamais la société, à l’échelle de pays entiers. Paris est devenue un ghetto pour (très) riches dans lequel la plupart des employés ont le droit de pénétrer uniquement pour travailler : ils vivent de l’autre côté du mur, de façon à ne pouvoir nuire. L’auteur ne s’attarde pas sur les raisons de cette scission et c’est aussi bien, il se concentre sur ses conséquences. Une poignée d’hommes contrôle tout, capte les richesses et le reste de la population se partage les miettes (hum, je sais, à ce stade c’est vraiment très proche de notre réalité).
L’un de ces hommes, Adamas, ne fraye pas avec les autres. Autant parce qu’ils le rejettent que par volonté de sa part. Or, Adamas rachète 1T, une entreprise en faillite pour deux raisons : sa gestion est catastrophique et elle n’innove plus. Les ennemis d’Adamas ainsi que les médias se gaussent. Celui-ci n’a jamais fait la moindre erreur au cours de sa carrière, ils ne comprennent pas l’objectif de ce rachat… à leurs yeux, cette acquisition n’a aucun sens !
Au fond, même s’ils l’espionnent, l’envient et le méprisent tout autant depuis des années, ils n’ont toujours pas compris son fonctionnement. Adamas ne pratique pas, contrairement à eux, la politique du pot de terre contre le pot de fer ou de la terre brûlée. Lui, il va à la pêche. Sa méthode consiste à écarter les requins, soigner les dauphins et rééquilibrer le biotope de l’aquarium… Pour cela, il emploie le Cosplay, dans lequel ses « élèves », les Nonpareils, obligent les employés à s’immerger et (re)définir leurs propres règles. Les employés de 1T vont devoir s’accrocher ! (ou pas…)

Alors c’est vrai, il y a un côté bisounours, la ficelle qui sauve tout à la fin n’est pas crédible, certaines valeurs me laissent dubitative et les Nonpareils, à l’image de leur mentor, sont effrayants de plus-que-perfection. Mais que voulez-vous que je vous dise ? La magie a opéré, je n’ai pas pu lâcher le roman, certains passages m’ont fait frémir (parce que tout n’est pas rose, loin de là), j’ai rigolé comme une bossue à certains passages, adoré la façon dont Tancrède règle le problème Jenna Briggs et particulièrement apprécié les courtes présentations des personnages célèbres adoptés par les joueurs. Mon humour est douteux, ça vous le savez déjà, lire en guise de présentation « Spartacus, gladiateur syndiqué à Capoue », ou « Che Guevara, vedette des guérillas, vendeur de T-shirts »… ça m’a fait marrer ! Rien que pour ces assertions, le roman mérite d’être lu. On met un peu de temps à plonger pour de bon dans le Cosplay, mais ça en vaut la peine !

Reste à voir, maintenant, ce que fera l’auteur au cours des prochaines volutions… Restera-t-il sur la volonté de suivre et développer le banc de dauphins ?


Chronique de Roanne

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